La balllade du fiancé de la chimère

Recherches bibliographiques

La légende dont vous faites mention est en effet attestée au quatrième tome des Odes de Pataouès le Prolixe, le Berger Graphomane.

Je rappelle que selon la tradition que nous rapporte Vazamorphe le Morne, cet ouvrage regroupe les textes que Pataouès avait écrit sur les parchemins qu'il tirait du patient massacre des troupeaux qui lui étaient confié. Quand il eut à cette fin tué et tanné toutes ses brebis, tous ses chiens, il grava ses dernières pièces sur les rochers qui entouraient sa cabane, puis sur les planches de cette dernière, enfin sur son propre corps et sur les bouts de peau et les os qu'il parvint à s'arracher avant de mourir.

On raconte qu'impressionné par cet acharnement les Dragons auraient choisi de préserver rochers, planches et cadavre des ravages du temps et qu'un heureux voyageur pourrait les retrouver, mais là n'est point notre propos.

L'ouvrage n'est plus en ma possession, suite à une fâcheuse affaire, mais j'avais par bonheur traduit quelques uns des textes, au nombre desquels se trouve, par un heureux hasard, la ballade recherchée.

La balllade* du fiancé de la chimère

Muse vive, Fumerol, t'inspirait jour et nuit!Des mots charmants et sûrs dans ta bouche brillaient,Ton esprit, de beauté inépuisable puits,Allumait mille feux en ceux qui t'entendaient.Arisatimeïlphante arriva un beau jourEt tes vers lui semblèrent miel sucré et doux lait.A ton âme la Chimère par un serment d'amourUnit en fiançailles son âme à tout jamais!Et de rêves en vers et de vers en rêves,Vous voyagèrent sans trêve ivres d'une douce paix,Des rêves des Dragons abordant chaque grève,Des vers de Fumerol en rehaussant l'apprêt.Las un jour, une nuit, un temps de désespoir,Lors d'un vol tranquille tomba le couperet :Du dos de ton amante, poète, tu vins à choir.Et l'infini fatal froidement te recouvrais.Et Arisa éprise de son précieux trouvèreRefusa d'accueillir pour sa vie d'autres mets:Comme le Rêve la prive du fiancé aux doux versLe Rêve en elle se meurt, et elle disparaît!Mais pourtant on murmure, que non, ne sont pas mortsLes vers de Fumerol, son sourire, ses sonnetsEt que de s'évanouir Arisa eut bien tortOublieuse que l'amour peut durer à jamais.

*NdT Pataouès prétend inventer un genre nouveau: la ballade, le genre poétique fort libre, appliqué au thème d'une balade, ici la promenade trans-onirique du fiancé et de le chimère, donne une "balllade", en vertu de "loi" selon laquelle L+2 L= 3 L. L'auteur va ensuite plus loin, et affirme que puisque les Chimères aiment tant les balades et les ballades, ce sont elles les inventrices de la balllade. Il en déduit ensuite que ces créatures en forgeant ce terme avec 3 l curieux qui tapent à l'oeil, révéleraient qu'elles auraient en fait trois ailes, afin de décourager les artistes aventureux d'en user avec elles comme avec de simples montures. La troisième aile, invisible et ne se manifestant que fugacement sur le dos de l'animal étant destiné à expulser le prétendant cavalier. Elle serait par accident responsable de la chute de Fumerol. Il est patent que la santé mentale du berger était déjà passablement entamée lorsqu'il rédigeait ses odes...

Bufal, archiviste.

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